Le Docteur Shoshana Bennett (plus connue sous le nom de Dr. Shosh) est une survivante de deux dépressions postnatales ayant mis sa vie en danger. Après avoir traversé ces douloureuses épreuves, elle est sortie de son cauchemar pour devenir l’une des principales porte-parole et pionnière mondiale en matière de santé mentale chez les femmes. Le programme « Postpartum Assistance for Mothers » qu’elle a mis en place lui permet d’informer et d’apporter son soutien aux femmes souffrant de dépression postnatale et de troubles annexes.
J’ai eu le grand plaisir d’assister à un cours dispensé par le Dr. Shosh lors de ma formation de Gentle Sleep Coach®. Impressionnée par son savoir et ses compétences, je lui ai demandé de me faire l’honneur de partager ses connaissances afin de mieux saisir ce mal-être qui ronge tant de parents.
Lors de mon entretien avec le Dr. Shosh, nous avons abordé les questions fondamentales et les plus courantes sur la dépression post-partum, dont celles liées, aux symptômes et au traitement.
Q: Comment distinguer la dépression post-partum d’un baby blues?
Dr. Shosh: Il y a deux façons de différencier le baby blues du trouble de la dépression post-natale. La première concerne la durée des symptômes. Le baby blues devrait disparaître environ 2 semaines après l’accouchement ou après l’accueil d’un bébé adopté. Si les symptômes persistent au-delà de deux semaines, nous parlons alors de dépression post-partum, même s’elle s’avère légère. À ce stade, la mère devrait consulter son médecin afin d’évaluer si elle a besoin d’une aide supplémentaire au soutien dont elle bénéficie à ce stade. La durée est donc un facteur différentiel.
La deuxième façon de distinguer une dépression survenue après l’arrivée du nouveau-né et le baby blues concerne le degré de gravité des symptômes. Dès l’accouchement, les symptômes peuvent être la peur, l’anxiété, la tristesse, la torpeur, une faible estime de soi, des pleurs, la colère, une perte d’appétit, des insomnies et une incapacité à dormir la nuit même si le petit dort. Si certains de ces symptômes surgissent et entravent le quotidien de la maman, il faut agir de suite. Même si les signes apparaissent au cours des deux premières semaines post-partum, elle devrait immédiatement consulter en vue d’obtenir l’aide nécessaire.
Il existe donc deux manières de différencier la dépression post-partum du baby blues plus fréquemment vécu: la durée et la gravité des symptômes. Si vous êtes confronté à l’un ou l’autre facteur différentiateur, contactez un spécialiste en périnatalité tel qu’un psychothérapeute spécialiste en troubles de l’humeur et de l’anxiété périnatale ou un autre professionnel de la santé en qui vous avez totalement confiance.
Q: Combien de mères sont touchées par la dépression post-partum?
Dr. Shosh: Environ 1 femme sur 7 (soit environ 15%) des nouvelles mères sont confrontées à une maladie plus grave qu’au baby blues qui est plus couramment diagnostiqué. La dépression post-partum est un des troubles les plus courants de la maternité.
Q: Les pères peuvent-ils également souffrir de dépression post-partum?
Dr. Shosh: Oui, absolument. Bien sûr, cela ne se produit pas en raison du changement hormonal lié à la reproduction, mais de nombreux facteurs peuvent provoquer une telle réaction post-partum. Un problème de santé mentale, le stress et la privation de sommeil peuvent causer ou aggraver la situation. 10% des nouveaux papas souffrent de dépression post-partum. Si la maman est également souffrante de dépression, il s’agit du facteur déclencheur le plus courant de la dépression post-partum du père. Si la mère présente des symptômes de la maladie, le taux de dépression paternelle observé se situe ente 24% et 50%. Il est également possible que le papa soit affecté alors que la maman ne souffre pas de dépression. Au cours de ces trois dernières décennies, j’ai été contactée par des mamans en parfaite santé mentale mais elles s’inquiétaient pour leur partenaire.
Q: La dépression post-partum d’un parent peut-elle impacter le bébé?
Dr. Shosh: La réponse est très clairement: « Oui, c’est possible! ». C’est l’une des principales raisons pour lesquelles j’insiste sur le fait qu’il faille traiter le plus rapidement possible une dépression ou une anxiété postpartum, car elle peut affecter toutes les relations au sein d’une même famille. Les enfants, en particulier les jeunes enfants, sont extrêmement vulnérables aux conséquences négatives de la dépression d’un parent. Ceci est d’autant plus vrai lorsque la personne référente (qui est dans la majeure partie des cas, mais pas toujours, la mère), souffre de dépression post-partum. La décision la plus sage que la mère ou le père puisse prendre s’il / elle est déprimé est de demander de l’aide le plus rapidement possible. Ainsi, son état n’interfèrera pas avec la création ni la qualité du lien d’attachement avec l’enfant. C’est la plus grande preuve d’amour que la personne malade puisse lui donner.
Si la dépression se déclare pendant la grossesse, elle peut affecter le fœtus en pleine croissance, mais encore plus un petit bébé. Si la personne déprimée n’est pas prise en charge à temps, les risques que l’enfant développe des problèmes comportementaux, neurologiques, sociaux et affectifs ainsi que des troubles de développement sont plus élevés. De plus, le danger que l’enfant devienne lui-même dépressif plus tard s’accroit si le parent n’est pas traité rapidement.
Les enfants sont très résilients. Si la dépression post-partum est détectée assez tôt et si l’enfant est pris en charge par un proche en bonne santé, il aura de grande chance de ne pas en subir les conséquences néfastes. Mieux vaut donc ne pas prendre de risque. Maman mérite d’être heureuse, Papa aussi. Il faut agir au plus vite pour le bien-être de leur descendant(s).
Q: Quel est le traitement que vous recommandez?
Dr. Shosh: J’ai développé la “Dr. Shosh Wellness Strategy”. Cela consiste à se débarrasser des mythes sur la maternité tels que « Mes besoins ne comptent plus » et une très bonne communication au sein du couple ou entre la mère et la personne qui lui est la plus proche. La personne a également besoin d’une bonne activité physique tant qu’elle est autorisée à faire de l’exercice. Il est toujours conseillé de trouver un moyen pour s’oxygéner le cerveau. Mettre le nez dehors permet à la fois d’être physiquement active et d’améliorer sa santé mentale.
En outre, la personne a besoin d’un excellent programme nutritionnel. Je recommande de consommer certains suppléments, à condition que son médecin lui donne le feu vert. Ceux-ci peuvent permettre d’éviter la dépression post-partum, pas seulement de la traiter. Mangez tout au long de la journée de bons aliments (je les passe en revue avec mes clients), rester hydratée. Être soutenue, tant sur le plan physique qu’émotionnel, permet d’éviter, ou du moins minimiser, la dépression post-partum.
Si la personne souffre déjà de dépression, elle doit consulter un spécialiste en périnatalité. Elle ne devrait pas se contenter de son médecin généraliste. Il est très important de ne pas perdre de temps avec un thérapeute lambda. Elle a besoin d’un professionnel dûment formé et avec l’expertise clinique requise.
Q: Les symptômes de la dépression post-partum peuvent-ils disparaître avec le temps et sans l’aide d’un spécialiste ?
Dr. Shosh: La réponse générale à cette question est: « Oui, c’est possible! ». Cependant, il est peu probable que la dépression disparaisse d’un coup de baguette magique. Vous devriez agir et la traiter dès que possible. Lorsque je parle de traitement, je ne fais pas automatiquement allusion à la prise de médicaments. Une bonne thérapie et un programme de bien-être adapté à la personne peuvent apporter d’incroyables résultats lui permettant de se remettre sur pied et de profiter de sa nouvelle vie.
Dans le cas où vous laissez les choses suivre leur cours en espérant que le temps effacera le mal-être, vous prenez un gros risque. Même s’il est possible que la situation s’arrange sans prise en charge, la maladie pourrait également ronger la personne pendant des années. Entre-temps, toutes sortes de problèmes qui auraient pu être évités ont perturbé la tranquillité du foyer. Il n’y a absolument aucun avantage à espérer que la dépression disparaisse d’un claquement de doigts. Mieux vaut mettre en place une bonne stratégie de remise en forme pour qu’elle devienne rapidement plus qu’un mauvais souvenir.
Q : L’allaitement est-il un bon moyen de prévention contre la dépression post-partum?
Dr. Shosh: Non, l’allaitement ne réduit pas le risque de souffrir d’une dépression post-partum. Des centaines et des centaines de femmes en colère qui m’ont appelé au fil des années. Elles étaient mécontentes parce que des professionnels de santé ou des personnes de leur entourage les avaient informées qu’elles seraient préservées de la dépression post-partum s’il elles allaitaient. Ils m’appellent et me demandent: «Qu’est-ce qui s’est passé? J’ai bien suivi les recommandations et je suis quand même déprimée! ».
Malheureusement, la dépression post-partum n’épargne personne, que vous allaitiez, que vous donniez du lait maternel ou du lait en poudre à l‘aide d’un biberon. La dépression peut survenir peu importe la façon dont vous nourrissez votre enfant. Le plus important est que vous le nourrissiez comme vous le souhaitez au plus profond de vous-même et de la faculté de votre corps à produire du lait maternel. Ne vous mettez pas la pression de telle manière que vous vous dites: «Si j’allaite, je ne passerai sûrement pas par la case dépression post-partum». Cela peut arriver dans tous les cas et ce, malgré l’allaitement.
Sachez également que si vous suivez un traitement pour soigner une dépression post-partum, il n’y a aucune raison d’interrompre l’allaitement. Vous devriez pouvoir continuer de nourrir votre enfant au sein, même si vous prenez des médicaments. Il est donc important de travailler avec des professionnels de la santé qui savent ce qu’ils vous conseillent et vous prescrivent. Beaucoup de femmes déprimées et allaitantes ont peur de demander de l’aide. Elles pensent que si elles ont besoin de médicaments, elles devront arrêter l’allaitement. Ce n’est pas le cas avec les antidépresseurs. Trouver les bonnes personnes qui ont la connaissance et l’expérience en la matière pour vous aider à traverser cette épreuve, est essentiel.
Q: Recommanderiez-vous à une mère de prendre des antidépresseurs pendant la grossesse ou si elle allaite?
Dr Shosh: Outre ce que j’ai mentionné précédemment, ce qui est très important et ce que je recommande, c’est d’élaborer un programme de bien-être qui convienne à la personne. Il n’y a pas d’approche standard applicable à tous ceux qui souffrent de dépression. Chaque femme touchée par la dépression a besoin d’un programme élaboré sur mesure.
Si elle a vraiment besoin de médicaments pour guérir, mieux fonctionner, s’amuser et nouer des liens avec son bébé, je lui recommanderais de prendre toutes les mesures nécessaires pour être heureuse et en bonne santé.
Si elle n’est pas prise en charge, cela peut impacter toute la famille, y compris le nouveau-né. Il est donc essentiel qu’elle reçoive l’aide adéquate, même si cela signifie qu’elle doive prendre des médicaments. Il en va de même pour les femmes enceintes. Les psychiatres avec lesquels je travaille en proche collaboration diront qu’ils en savent assez à ce stade. Par conséquent, si une femme enceinte est jugée cliniquement déprimée (il y en a tout autant que les mères dépressives, soit 15%) et a besoin de se sentir mieux, elle doit se prendre en main pour que sa famille, y compris le bébé, n’en souffre. Si les médicaments sont la réponse à ses maux, elle devrait suivre les recommandations de son docteur.
Dans la plupart des cas, la prise de médicaments n’est pas nécessaire pendant la grossesse. J’ai écrit le livre “Pregnant on Prozac” («Enceinte sous Prozac») afin d’informer au mieux les personnes concernées par la dépression. Dans cet ouvrage, je liste les sources d’informations recommandées. Je conseille vivement d’ignorer les publicités et les fake news qui effraient tout le monde.
En résumé, la future maman devrait entreprendre les démarches nécessaires afin d’améliorer son état de santé. Cela aura un impact positif pour toute la famille. Bon nombre de mes clientes finissent par ne plus avoir besoin de médicaments ou sont capables de se sevrer grâce à une très bonne thérapie et au programme de bien-être mentionné ci-avant.
Q: La dépression post-partum revient-elle automatiquement à la deuxième grossesse ou après la naissance du deuxième enfant?
Dr Shosh: Si vous présentez des symptômes de dépression post-partum après une naissance et que vous n’avez pas de programme de bien-être en place, vous courez un risque très élevé de souffrir d’une autre dépression post-partum après un accouchement ultérieur. J’insiste sur le « Si » parce que si vous travaillez avec moi, je vous fournirai un plan d’action. Je fais cela depuis environ 30 ans et j’ai travaillé avec des femmes ayant eu de nombreux enfants après un épisode de dépression. En fait, elles sont parvenues à éviter la dépression post-partum parce qu’elles disposaient d’un excellent programme de bien-être pendant la grossesse et après l’accouchement. Elles savaient comment s’organiser pour préparer les repas, pour bien dormir la nuit, etc.
La dépression ne revient pas automatiquement mais le risque encouru est élevé, sauf si vous avez mis en place un plan de prévention. Dans quelques-uns de mes livres, comme « Postpartum depression for Dummies » (La dépression post-partum chez les nuls), il y a tout un chapitre consacré à l’importance de la prévention. Si vous avez souffert de dépression après la naissance d’un de vos enfants, lisez-le afin de vous préparer à l’arrivée de votre prochain bambin.
Quoi qu’il en soit, il n’y a pas de quoi s’inquiéter tant que vous obtenez l’aide adéquate. Si vous pensez que vous ou un de vos proches souffrez de dépression postnatale, n’attendez pas en espérant que la situation s’améliore. Si vous avez des questions pour le Dr. Shosh, vous pouvez la contacter directement via son site web, Facebook ou Twitter.
Le Dr Shosh a aidé à élaboration du programme officiel de formation pour les professionnels et a été présidente de Postpartum Support International. Elle est également la productrice exécutive du documentaire primé « Dark Side of The Full Moon ». Elle est l’auteur de « La dépression post-partum pour les nuls », « Enceinte sous Prozac », « Enfants de dépressif » et co-auteure de « Au-delà du blues: comprendre et traiter la dépression prénatale et postpartum et l’anxiété ». Le Dr. Shosh est à l’origine de la première application « PPD Gone! » (Au revoir la dépression postpartum !) Elle a cofondé la Postpartum Action Institute pour former les leaders communautaires et les défenseurs des droits des parents. Bennett a beaucoup voyagé à travers les États-Unis et dans le monde en tant que conférencière invitée et principale, formant des professionnels de la médecine et de la santé. Elle est bien connue pour son émission « Dr.Shosh.com Radio Show » et a participé à de nombreuses émissions de télévisées et à la radio, dont « 20/20 », « Ricki Lake » et « The Doctors ». Tous les médias la consultent, l’interviewent et la citent régulièrement, y compris CNN, le Wall Street Journal, WebMD, NPR, Psychology Today, USA Today, Parenting, The Huffington Post et Cosmopolitan. Elle a reçu de nombreux prix honorant ses contributions exceptionnelles et son travail en tant que défenseure de la santé mentale des femmes. Au début de sa carrière, elle a travaillé comme enseignante en éducation spécialisée auprès d’enfants autistes ou ayant des difficultés d’apprentissage. Elle a ensuite enseigné l’éducation de la petite enfance, la psychologie et l’éducation spécialisée dans plusieurs collèges de Californie. Elle a obtenu trois diplômes d’enseignante, deux maîtrises, un doctorat et une licence de psychologue clinicienne. Aujourd’hui, elle a aidé plus de 20’000 femmes à travers le monde grâce aux consultations individuelles, à de groupes de soutien, d’ateliers de groupe et des séminaires. Lutter pour la santé mentale des mères est la mission de sa vie. Elle donne de l’espoir grâce à son sens de la compassion, son expérience personnelle et par l’application de ses connaissances accumulées au fil des années. Le Dr. Shosh aide ses clients et ses collègues à comprendre que ces troubles peuvent être complètement traités. Avec l’aide adéquate, les femmes peuvent sortir d’une situation critique en prenant les meilleures décisions possibles pour elle-même et leurs familles, et devenir plus heureuses que jamais.
En résumé :
- La dépression post-partum est un des troubles les plus courants de la maternité (environ 15% des nouvelles mères en souffrent).
- Un papa sur dix souffre également de dépression post-partum.
- La dépression post-partum se différencie du baby blues par la durée et la gravité des symptômes.
- Si la personne déprimée n’est pas prise en charge à temps, les risques que l’enfant développe des problèmes comportementaux, neurologiques, sociaux et affectifs ainsi que des troubles de développement sont plus élevés.
- Si la dépression post-partum est détectée assez tôt et si l’enfant est pris en charge par un proche en bonne santé, le petit aura de grande chance de ne pas en subir les conséquences néfastes.
- Pour combattre la dépression post-natale il est conseillé de :
- maintenir un bonne communication au sein du couple ou avec un proche ;
- être soutenu(e), tant sur le plan physique qu’émotionnel ;
- exercer une activité physique (p.ex. marcher au grand air) ;
- manger de bons aliments ;
- rester hydraté(e) ;
- consulter un spécialiste en périnatalité pour élaborer un plan d’action sur mesure.
- Il n’existe aucune étude démontrant que l’allaitement réduit le risque de souffrir d’une dépression post-partum.
- Une femme peut prendre des antidépresseurs pendant la grossesse ou si elle allaite.
- Il est peu probable que la dépression disparaisse avec le temps. Mieux vaut en place une bonne stratégie de remise en forme dès que possible pour éviter de graves répercussions sur le malade et sa famille.
- Si vous ne suivez pas de programme de prévention et de bien-être, vous courez un risque très élevé de souffrir d’une autre dépression post-partum après une naissance ultérieure.
Si vous souhaitez obtenir davantage d’informations pour améliorer la qualité et/ou la quantité de sommeil de votre enfant (et le vôtre par la même occasion), n’hésitez pas à prendre rendez-vous pour discuter. La première consultation est gratuite et sans engagement!